par Olivier Bompas
Devenu AOC en 2013, ce petit vignoble adossé aux Cévennes bénéficie d’un climat tempéré et aéré qui lui permet de présenter des vins vifs en blancs, rosés et rouges. Et ça marche !
Baptiste Cartier est aux commandes du domaine Deleuze-Rochetin, propriété de Catherine et Jean-Michel Cathonnet.
Vingt-cinq hectares de vignes cultivés en bio dans l’appellation duché d’Uzès, un vignoble d’un peu plus de 300 hectares qui s’étend, au cœur des garrigues gardoises, du nord de Nîmes aux contreforts des Cévennes, sur le territoire de l’ancien diocèse des évêques d’Uzès. « Je suis arrivé il y a 8 ans, l’année de l’AOC… J’ai vraiment assisté à la naissance de l’appellation. »
Les duchés d’Uzès ont longtemps fait partie de la famille des vins de pays (aujourd’hui IGP – indication géographique protégée). Au début des années 1990, la région comptait cinq zones de vins de pays qui se faisaient plus ou moins concurrence. Les responsables de l’époque ont alors créé deux dénominations : vins de pays des Cévennes et duché d’Uzès. Les premiers avaient vocation à demeurer un grand ensemble de vins de pays, les seconds, plus confidentiels, devaient devenir un jour appellation d’origine. Ce qui fut imaginé fut fait.
En 2013, après le parcours du combattant qui sied à ce genre de démarche, les vignerons pouvaient enfin trinquer à l’aboutissement de leurs efforts : l’entrée de leur vignoble dans la grande famille des AOC. Petit plus, qui fit alors la différence, le classement portait sur les trois couleurs, rouges, blancs et rosés, un exploit lorsqu’on sait que la reconnaissance se fait en prinment dans les vins, pour un terroir du Sud, c’est très étonnant, on capte une fraîcheur éclatante, les syrahs font penser aux vins du Vivarais, jusque dans les arômes, camphrés, mentholés, et les grenaches sont très aériens, ils pinotent presque et rappellent la finesse des bourgognes… »
C’est avec une cuvée Sarrazine 2016, un assemblage de syrah, grenache et mourvèdre élevé pour moitié en fûts de 500 litres et moitié en cuvée béton, que Baptiste illustre cette notion de fraîcheur : « Avec ce type de cuvée haut de gamme, on veut prouver que nos vins ont une bonne capacité de garde, si on propose actuellement du 2016, c’est parce qu’on veut vendre des vins prêts à boire, et ce qui les tient, c’est l’acidité, c’est une garantie de stabilité dans le temps. » Un atout qui contribue à la finesse des rouges et n’est pas étranger à la forte proportion de blancs produits dans l’appellation. Plus du quart des volumes et 18 % de rosés, quand l’appellation côtes-du-rhône en revendique respectivement 5 % et 8 % (duché d’Uzès fait partie des vignobles de la vallée du Rhône).
« On bénéficie d’un climat favorable, avec des amplitudes thermiques importantes entre le jour et la nuit, de 12 à 15 degrés d’écart, liées à l’influence continentale des Cévennes, explique Michel Souchon, président de l’appellation et de la très dynamique cave coopérative de Durfort. Ça préserve la vivacité, la fraîcheur du fruit, les vignerons sont très conscients de la richesse que ça représente, valoriser le terroir, c’est notre engagement, près de 70 % des vignerons de l’appellation sont en bio ou en conversion. »
Un gros travail est également engagé sur l’encépagement. Issus de l’assemblage du grenache blanc et du viognier, un cépage qui donne des vins facilement exubérants, les blancs devront inclure dès 2023 un troisième cépage parmi ceux dits complémentaires comme la roussanne, la marsanne ou le vermentino, considérés comme moins démonstratifs. « Les vignerons ont longtemps été favorables au viognier qui donnait des vins flatteurs, poursuit Michel Souchon, mais ça, c’était à l’époque des vins de pays, aujourd’hui, tout le monde a pris conscience que tout est question d’équilibre, qu’il faut aller vers la finesse. En quelques années, on a beaucoup progressé, l’image est montée, nos clients étrangers trouvent même qu’on ne vend pas assez cher, que la qualité est supérieure aux prix affichés. » (La grande majorité des vins sélectionnés se trouve en dessous de 10 euros.)